Le séminaire de Pantin se propose d’interroger les dimensions inconscientes du « racial » en tentant de repérer comment les subjectivités ont été affectées par la période coloniale et comment les silenciations de l’histoire reconduisent de violentes logiques de domination. Si ces effets commencent à être bien étudiés par les études postcoloniales et certaines recherches en sciences humaines et sociales sur la colonisation et ses suites, peu de travaux psychanalytiques se sont penchés sur la puissance retorse de ces silences et la manière dont ils traversent le sujet de l’inconscient. Avec Fanon et Mannoni entre autres, il nous est d’abord apparu que le concept freudien de démenti (Verleugnung) pouvait être opératoire pour articuler cette insistance spectrale qui, pour être inconsciente, n’en est pas pour autant refoulée. Il s’agissait ainsi de repérer comment le sujet de l’inconscient s’est en quelque sorte branché sur la promotion d’une logique raciale dans les sociétés occidentales, en frayant d’étranges voies de satisfaction de la pulsion et en tordant les représentations des corps assujettis et colonisés aussi bien que des corps« colonisants » : c’est alors toute la théorie psychanalytique de l’identification qui doit être revisitée. Ce concept, central dans la première théorie psychanalytique du lien social chez Freud, en particulier avec la notion de Surmoi, nous invitera à prendre au sérieux l’hypothèse de Balibar du racisme comme « structure psychique d’État ».